Rachel Keke, bientôt la première femme de chambre à l'Assemblée ?

Chevilly-Larue (Val-de-Marne), reportage

De délicieux effluves de pastèque, de cerises, d’abricots et de pêches émanent de la place Nelson Mandela, à Chevilly-Larue, où se tient le marché. « Allez, allez », hèlent les commerçants derrière leurs étals colorés, baignés par les rayons du soleil. Dans la tiédeur de l’après-midi, vers 15 heures, l’atmosphère fruitée pulse d’une vibration nouvelle. Une dizaine de journalistes se mêlent aux chalands, photographiant et filmant sous toutes les coutures un personnage singulier, qui s’engouffre dans l’allée : Rachel Keke, une Chevillaise de 48 ans qui, tout sourire, distribue des tracts en glissant de petites blagues ou en demandant aux têtes connues des nouvelles de leurs proches.

Si elle attire tant les lumières médiatiques, c’est que la candidate aux législatives pour la Nupes, dans la septième circonscription du Val-de-Marne, pourrait réaliser un tour de force sans précédent : devenir la première femme de chambre à s’asseoir sur les bancs de l’Assemblée nationale.

Rachel Keke rencontrant des habitants de Chevilly-Larue, le 15 juin 2022. © NnoMan Cadoret/Reporterre

« Je veux être la voix des sans-voix »

Depuis 2003, cette Franco-Ivoirienne s’occupe du ménage au sein de l’hôtel Ibis Batignolles, dans le 17e arrondissement. Avant de briguer le Palais Bourbon, elle était donc de cette France qui vit en banlieue, et prend des bus de nuit pour aller travailler à Paris. « Comme tous les invisibles, quand tout le monde dort », dit-elle. Avant de devenir gouvernante, elle a nettoyé jusqu’à quarante chambres par jour pendant quinze ans. « Des cadences impossibles, on se tue au travail, dit-elle. Beaucoup tombent malades, ont des tendinites, mal au dos ou au canal carpien. »

Fatiguée de courber l’échine, elle est devenue la figure du combat victorieux des femmes de chambre qui ont tenu tête au grand groupe hôtelier Accor pendant vingt-deux mois de grève, entre 2019 et 2021. « Il a fallu tenir les piquets de grève quelles que soient les saisons et les douleurs, résister aux insultes et aux menaces de licenciement, se souvient-elle. Mais nous avons prouvé que se battre n’était pas vain : les salaires ont augmenté, les cadences se sont ralenties… »

Rachel Keke : « J’ai beaucoup appris des coups reçus dans ma vie. » © NnoMan Cadoret/Reporterre

Forte de cette expérience victorieuse, et toujours mue par un irrépressible désir « d’être entendue », elle s’est lancée à l’assaut de…

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Auteur: Alexandre-Reza Kokabi Reporterre