Réciprocité, visibilité, équité : trois leviers essentiels pour lutter contre la crise climatique

En 2019, des millions de personnes manifestaient pour le climat dans le monde entier. En 2020, en pleine crise Covid, l’urgence climatique restait une préoccupation majeure pour les Français. L’année suivante, une étude publiée dans le prestigieux journal The Lancet montrait que plus de la moitié des jeunes entre 16 et 25 ans – et ce dans toutes les régions du monde – souffraient d’éco-anxiété.

Comment se fait-il que cette prise de conscience généralisée, et le désir authentique de préserver notre avenir climatique, ne se traduisent pas par des actions concrètes, telles que devenir végétarien ou soutenir des politiques climatiques plus volontaristes ?

On peut dire, tout d’abord, qu’un certain nombre de barrières structurelles limitent les possibilités d’agir pour le climat. De nombreuses personnes n’ont pas d’alternatives à la voiture pour se rendre au travail, ou n’ont pas les capacités physiques d’utiliser un vélo pour se déplacer.

Sur un plan plus psychologique, le manque d’information sur les solutions les plus efficaces pour limiter son empreinte carbone, la difficulté perçue pour mettre ces solutions en place, ou encore le manque de motivation lié au décalage entre le moment où les efforts doivent être consentis (aujourd’hui) et les bénéfices de ces efforts (une réduction du réchauffement climatique sur le long terme) sont autant de facteurs qui freinent les changements de comportements.

Bénéfices partagés, efforts individuels

Mais au-delà de ces barrières structurelles et psychologiques, l’urgence climatique présente un défi supplémentaire : les bénéfices sont partagés alors que les efforts sont individuels.

Par exemple, renoncer à prendre l’avion entraîne une réduction des émissions de CO2 qui bénéficie à tous, alors que le sacrifice, lui, est individuel. Ce problème d’action collective – aussi appelé « tragédie des communs » – mobilise le cerveau social, et en particulier la psychologie de la coopération.

À première vue, les extraordinaires capacités sociales de l’espèce humaine devraient faciliter la lutte collective contre le changement climatique. Malheureusement, les choses sont compliquées par le fait que la capacité humaine à coopérer dépend d’un certain nombre de conditions qui ne sont pas nécessairement remplies par les actions de lutte contre le réchauffement climatique.




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Tout d’abord, les citoyens sont plus enclins à contribuer à l’effort commun s’ils ont la preuve que les autres en font de même, et ils ajustent leurs comportements aux normes sociales prévalentes.

Si tout le monde jette ses déchets par terre, la probabilité qu’encore plus de déchets soient jetés augmente. Si, au contraire, il y a des indices que tous participent à un effort collectif de propreté, la probabilité que des déchets soient jetés diminue. C’est ce que les psychologues appellent la « conditionnalité de la réciprocité ».

Rendre visibles les comportements collectifs

Dans le cas de la crise climatique, la conditionnalité de la réciprocité pose un certain nombre de problèmes.

Tout d’abord, certaines normes sociales sont difficiles à observer. Ma voisine a-t-elle modernisé son système de chauffage pour qu’il soit plus efficace ? Est-ce que mon collègue soutient les politiques de rénovation thermique ? Or, en l’absence d’informations sur le comportement des autres, nous avons tendance à sous-estimer leur niveau d’engagement…




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La bonne nouvelle est que les normes sociales évoluent rapidement dès lors que les comportements vertueux sont rendus plus visibles. Par exemple, informer les personnes du fait qu’elles consomment plus de gaz ou d’électricité par rapport à leurs voisins fait baisser la consommation énergétique.

Le besoin de réciprocité peut par ailleurs créer un problème d’amorçage. Si les normes jouent un tel rôle moteur, comment passer d’une minorité d’acteurs engagés dans des comportements vertueux à une majorité ?

Heureusement, notre cerveau n’est pas seulement attentif au pourcentage de gens qui font une action, mais aussi à la dynamique des efforts…

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Auteur: Mélusine Boon-Falleur, PhD Candidate, École normale supérieure (ENS) – PSL