Recul du tourisme de masse : la transformation d’une station balnéaire emblématique du Sénégal

Saly : dans l’imaginaire de nombreux touristes et retraités européens, et notamment français, le nom même de cet ancien petit village côtier sénégalais, situé sur la Petite-Côte, à quelque 90 km au sud de Dakar, évoque le modèle typique de la station balnéaire.

Cette vision est désormais quelque peu dépassée. À Saly, la vie économique et sociale a longtemps reposé sur le dynamisme des complexes hôteliers et autres clubs de vacances célèbres gérés par les grands tour-opérateurs. Ce modèle qui s’essoufflait déjà a été profondément affecté par la pandémie de Covid-19. Certains hôtels historiques sont laissés à l’abandon, le principal restaurant est fermé et le centre commercial originel vivote.

Pour autant, loin de dépérir, la ville se transforme, attirant davantage la clientèle sénégalaise, tandis que les formes de la présence des Européens se transforment progressivement.

Le recul du tourisme de masse

La crise sanitaire mondiale de 2019 a incité les touristes de l’UE à opter pour des destinations moins éloignées que par le passé. Et cette tendance à un tourisme « de proximité » semble perdurer.

Les pratiques touristiques ont évolué vers de nouvelles formes, comme les Digital nomads (ces personnes qui choisissent de travailler à distance, souvent depuis un lieu de villégiature), qui correspondent moins aux standards du tourisme de masse. Les nouveaux voyageurs fréquentent moins les clubs et leurs besoins s’éloignent dorénavant de plus en plus du modèle « Sea, sun and sand ».

Un quartier de Saly au Sénégal privé de ses touristes

Place déserte à Saly au Sénégal.
Sébastien Fleuret/UMR ESO-Angers, Author provided

La pandémie a également généré une croissance du tourisme intérieur. Le Sénégal ayant été l’un des premiers pays à fermer ses frontières au moment de l’épidémie, les touristes sénégalais se sont réapproprié les espaces balnéaires côtiers désertés par les Européens. Certains hôteliers de prestations haut de gamme relatent qu’au moment des confinements, ils ont développé une offre promotionnelle essentiellement adressée à une clientèle dakaroise afin d’assurer un minimum d’activité dans leurs établissements.

Une plage au Sénégal avec des infrastructures délabrées

L’aménagement des plages souffre du manque d’entretien.
David Lessault/UMR ESO Angers, Author provided

La tendance a confirmé l’attrait, en nette augmentation depuis deux décennies, que suscitent les espaces côtiers chez les Dakarois. Chaque fin de semaine, l’accès à la seule plage de Saly qui soit dotée d’un parking, est pris d’assaut par des centaines de familles venant de Dakar et possédant une résidence secondaire ou séjournant en location dans des auberges alentour. Les habitants en profitent pour installer des gargotes éphémères où sont vendus poissons grillés, fruits et autres jus. Le temps d’un week-end, les Sénégalais semblent reprendre leurs droits, alors que durant la semaine cette plage est plutôt fréquentée par les touristes et résidents européens, voire leur est exclusivement réservée.

Des voitures sont garées aux abords d’une plage au Sénégal

La plage de Saly attire un tourisme interne sénégalais.
David Lessault/UMR ESO-Angers, Fourni par l’auteur

Nouvelles formes de présence européenne

Si le modèle de la station balnéaire dédiée au tourisme international semble avoir fait son temps, d’autres présences européennes se sont imposées localement. Dans un premier temps, Saly n’a pas échappé, à l’instar de nombreuses destinations des pays du Sud, à l’arrivée de Français retraités venus passer « l’hiver au chaud ». Pour les retraités célibataires, ces séjours longs sont parfois associés à la recherche d’un projet de vie en couple au Sénégal, de préférence avec un ou une partenaire plus jeune. Ces démarches sont assez fréquentes et pleinement assumées malgré le regard peu approbatif des populations locales, qui y voient parfois une pratique immorale compte tenu des grandes différences d’âge et de ressources.

Toujours est-il que le phénomène s’est développé depuis le début des années 2000 et se localise principalement dans une dizaine de résidences collectives fermées qui essaiment au sud de l’ancienne station balnéaire. L’autonomie de…

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Auteur: Sébastien Fleuret, Directeur de recherche au CNRS, géographe de la santé, Université d’Angers