Réflexions sur le financement de la Sécurité sociale

1/ Un financement illisible, complexe et instable

En 1945, les ordonnances des 4 et 19 octobre jetaient les bases d’un système de sécurité sociale en France inspiré du modèle « bismarckien » fondé sur le principe d’assurance sociale (gestion par les partenaires sociaux, financement par des cotisations à la charge des employeurs et des salariés). Elles visaient également à réorganiser les assurances sociales des années trente et reconnaissaient le rôle complémentaire des mutuelles. L’ordonnance du 4 octobre avait vocation à créer un régime général rassemblant l’ensemble des actifs mais reconnaissait l’existence de certains régimes particuliers dits « spéciaux ».

Depuis, la Sécurité sociale a connu de profondes évolutions. Il en va ainsi de la généralisation de certaines prestations (remboursements de frais de santé et prestations familiales) à toute la population, leur conférant un caractère universel sans lien avec l’activité professionnelle et les revenus. Il en va également des droits de retraite non contributifs (comme le minimum vieillesse, attribué sous condition de ressource) par exemple.

La création de certains prélèvements sociaux (les « impôts affectés ») a élargi l’assiette élargie des recettes sociales, au-delà des revenus du travail. Tel a été le cas avec la contribution sociale généralisée (CSG) et l’affectation d’autres impôts et taxes aux caisses de Sécurité sociale (droits sur les tabacs et les alcools, TVA…). Toutes branches confondues, la part des cotisations (266,1 Md€ en 2021) dans les produits nets des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) a baissé de 90 % à la fin 1980 à environ 50 % depuis 2019 (50,1 % en 2021)1.

La montée en charge de la fiscalisation n’a cependant pas été pensée comme relevant d’une approche « beveridgienne » à visée universaliste et financée essentiellement par l’impôt, mais comme la compensation des baisses du « coût du travail » sous forme d’allègements de cotisations sociales. Ceux-ci sont en principe compensés par le budget de l’État depuis 2011, même si l’exonération de cotisations salariales sur les heures supplémentaires (1,8 Md€ en 2021) décidée par la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2019, n’est pas compensée. Récemment, la Sécurité sociale s’est étendue au risque de dépendance. Au fil du temps, les circuits de financement sont devenus complexes, instables et parfois même,…

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Auteur: Observatoire de la justice fiscale , Vincent Drezet