Refusées à l'hôpital, déplacées entre maternités… La difficile prise en charge des femmes enceintes exilées

L’adresse doit rester secrète. Nichée en Seine-et-Marne, près de la ville de Brie-Comte-Robert, une grande maison blanche sert de refuge à douze femmes enceintes isolées. Ici, tout le monde peut demander de l’aide « qu’elles aient des papiers ou non », insiste Marie-Noëlle Couderc, directrice de la Maison de Tom Pouce, qui les accueille pendant leur grossesse, mais aussi après.

Aux murs de la salle à manger, des panneaux colorés rappellent les tâches ménagères destinées à chacune des occupantes. L’objectif : autonomiser ces futures mères dont les chemins de vie périlleux les ont menées jusque-là. Parmi elles, une partie est exilée et sans-papiers.

« J’appelais le 115 tous les jours, ils n’avaient jamais de place »

Krisna, 25 ans, interrompt son cours d’art-thérapie pour dérouler son histoire. Née en France de parents étrangers, elle perd sa mère quand elle a trois mois et part pour le Portugal avec son père avant de revenir dans l’Hexagone à l’âge de 15 ans. Faute d’avoir vécue suffisamment longtemps sur le territoire français, Krisna peine à régulariser sa situation. Lorsqu’elle se retrouve enceinte en décembre 2021, elle a du mal à pouvoir faire une échographie. « On me demandait si je disposais de l’aide médicale d’Etat (AME) [dispositif permettant aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d’un accès aux soins] mais ce n’était pas le cas », retrace la jeune femme dont le tee-shirt Looney Tunes dépasse du plaid à l’intérieur duquel elle s’est enveloppée. À partir de trois mois de grossesse, cet examen fait partie des soins urgents et le remboursement est réalisé automatiquement.

Peu après avoir appris qu’elle était enceinte, Krisna est mise à la rue par sa famille, qui estime qu’elle est une charge pour eux, et qu’elle doit se débrouiller seule. Elle tait sa grossesse, craignant d’exacerber les tensions et les rejets, quitte le foyer familial et dort dans les cages d’escaliers. « J’appelais le 115 tous les jours, ils n’avaient jamais de place. Il y a toujours des gens plus prioritaires », soupire-t-elle en jouant avec ses ongles vernis. Un soir, elle tente de joindre plusieurs associations franciliennes en charge des futures mamans, en suivant une liste trouvée sur le web. Le deuxième numéro est celui de la Maison de Tom Pouce. Ouverte depuis 1987, elle fait office de cocon pour ces jeunes mamans : 70 % d’entre elles sont mineures. « Deux psychologues sont à leur disposition pour pouvoir les accompagner »,…

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Auteur: Audrey Parmentier