Réjane Sénac : « À travers le rapport au principe d’égalité se lisent les déceptions et trahisons vis-à-vis d’idéaux dévoyés »

  • Réjane Sénac est directrice de recherche CNRS au CEVIPOF, le Centre de recherches politiques de Sciences Po où elle enseigne. Son dernier ouvrage s’intitule « Radicales et fluides. Les mobilisations contemporaines » (Presses de Sciences Po, 2021). Elle nous a fait le plaisir de répondre à quelques-unes des questions que suscite cette enquête de terrain qui porte sur les mobilisations radicales transnationales contemporaines trop souvent caricaturées dans le débat public franco-français.

Chronik –  Certains tentent de réduire les radicalités incarnées par les mobilisations contemporaines animées par l’intersectionnalité à de purs produits d’importation idéologiques et culturels « made in USA ». En quoi les mobilisations qui se développent en France cultivent-elles une forme de particularisme (tout en s’inscrivant dans un mouvement global) ?

RS – Votre question permet d’aborder plusieurs enjeux imbriqués : le renouveau transnational et national de la contestation et la réhabilitation d’une radicalité politique perçue comme une mise en danger de la République française.

Les mobilisations contemporaines contre les injustices s’inscrivent en continuité avec une revendication centrale des mouvements de places apparus à partir des années 2010, à savoir la participation directe au processus de décision et la dénonciation des limites d’une démocratie représentative portant les intérêts des élites et non l’intérêt général et/ou du plus grand nombre. En écho aux mobilisations populaires ayant eu lieu dans de nombreux pays du Maghreb et du Moyen-Orient (Tunisie, Jordanie, Égypte, Yémen, Libye, Bahreïn, Maroc, Syrie) sous le nom de « printemps arabe », l’occupation de places publiques (en Espagne avec les Indignados 15-M, à New York avec Occupy Wall Street ou en France avec Nuit debout) a été analysée comme marquant une « nouvelle génération de mouvements » se fondant « davantage sur un pragmatisme culturel et l’expérience personnelle que sur une organisation qui leur donnerait une identité collective ». Ce renouveau transnational et national de la contestation bouscule le rapport aux catégories et aux frontières du politique à travers l’émergence d’une aspiration démocratique se méfiant des médiations, des affiliations partisanes et prenant la forme d’un « mouvement de contestation générale des gouvernants et de leur jeu, au nom du peuple ». La création d’une communauté de colère et de résistance face à des injustices…

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Auteur: La rédaction