Rendre la justice malgré un système exsangue : le travail invisible des greffiers

« Ce n’est pas seulement en recrutant plus de juges qu’on aura une justice plus rapide. Sans les métiers supports comme les greffiers, ça n’ira pas plus vite. Le juge prend une décision mais il ne va pas la taper, l’enregistrer, la notifier. Ça c’est le greffier qui s’en occupe », explique Gabriel Ibbou, 34 ans, greffier depuis six ans au tribunal d’Auxerre (Yonne) et syndiqué à l’UNSA. Le métier de greffier est peu connu, la profession habituée à la discrétion. « Pendant mes études de droit, je n’avais presque pas entendu parler du métier de greffier. Dans mes cours d’institutions judiciaires, il y a de nombreuses pages sur les métiers d’avocat ou de magistrat mais seulement une demi-page sur le greffier », se rappelle Cyril Papon, 42 ans, greffier depuis douze ans, en poste au tribunal de Bobigny et secrétaire général de la CGT Chancellerie et Services judiciaires.

Le travail du greffier est pourtant essentiel au fonctionnement de la justice. Il est présent à toutes les étapes de la procédure et s’assure qu’elle est bien respectée. Une audience ne peut pas se tenir sans lui. Un jugement au bas duquel figurerait la signature du juge mais pas la sienne serait considéré comme nul. Le greffier est aussi, souvent, le principal contact du justiciable ou de l’avocat qui le représente avec l’institution. C’est en effet lui qui informe les parties des dates d’audience ou assure l’accueil du public.

Empilement des lois et dysfonctionnements techniques

Lois antiterroristes, code de justice pénale des mineurs, loi de lutte contre les violences sexuelles et sexistes, loi visant à améliorer la justice de proximité et la réponse pénale… Les réformes touchant la justice se sont multipliées ces dernières années, entraînant chacune leur lot de changements de procédures. Les modifications apportées en 2019 par la loi de « programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice » n’ont pas encore toutes été absorbées dans les tribunaux que la dernière loi d’Éric Dupond-Moretti du 22 décembre 2021 « pour la confiance dans l’institution judiciaire » vient à nouveau apporter son lot de changements.

Chacune de ces nouvelle dispositions bouleverse le quotidien des greffiers qui peinent d’autant plus à s’adapter que les outils censés les aider à le faire tardent à arriver. Prenons l’exemple des « trames », sorte de textes de base pré-écrits qu’ils personnalisent afin d’établir des décisions. « On attend encore les trames de la loi de 2019 !

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Auteur: Lucie Tourette