Rendre visible la violence managériale. Les cas de France Telecom et de la Poste

C’est aujourd’hui qu’est prévu le verdict du procès en appel de France Télécom (on peut en lire la chronique collective, organisée par l’Union syndicale Solidaires, en ligne). Il fait suite à la procédure en première instance à l’issue de laquelle, en décembre 2019, le tribunal correctionnel avait reconnu coupable les anciens dirigeants de France Télécom (devenue Orange), ainsi que l’entreprise elle-même en tant que personne morale, de harcèlement moral institutionnalisé dans le cadre d’une stratégie d’entreprise.

Ce procès a été accompagné par un important travail académique et militant d’analyse de la dégradation de la qualité du travail et des souffrances (pouvant conduire comme dans le cas de France Télécom à une série de suicides) causées par le management capitaliste, notamment dans les entreprises anciennement publiques ayant connu de profondes réorganisation structurelles et des bouleversements violents des activités des salarié.e.s.

Dans ce grand entretien, paru en juin 2022 dans le n° 28 de revue Les Mondes du travail et que nous republions en même temps que l’introduction qui le présente, Eric Beynel et Nicolas Jounin examinent les politiques managériales mises en œuvre à France Télécom et à La Poste, et questionnent la portée politique de leur critique, notamment en ce qui concerne les luttes syndicales.

Eric Beynel est ancien dirigeant syndical de Solidaires, SUD, auteur de La Raison des plus forts (2020). Nicolas Jounin est sociologue, auteur de l’ouvrage Le Caché de La Poste (2021). Sophie Béroud est Professeure des universités en sciences politiques à l’Université Lyon 2, membre du laboratoire Triangle. David Gaborieau est maître de conférences en sociologie à l’université de Paris, membre du CERLIS.

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Introduction

Le secteur des activités postales et des télécommunications a connu en France une mutation de grande ampleur sur une période de vingt ans. En 1990, le gouvernement Rocard décidait de démanteler les PTT, un « établissement public à caractère industriel et commercial » qui rassemblait la poste et les télécommunications, pour créer deux entités distinctes et répondre ainsi aux impératifs de libéralisation et d’ouverture à la concurrence des services imposés par l’Union Européenne. Très vite, l’option a consisté à transformer en profondeur France Télécom pour en faire une entreprise privée et l’un des acteurs centraux, via la création d’Orange, du déploiement de la téléphonie mobile et d’internet….

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Auteur: redaction