Reprendre la ferme des parents : un cinéaste et des jeunes paysans face à l'héritage familial

  • Malzéville (Meurthe-et-Moselle), reportage

« Ça me coûte de remuer le passé, de faire des interventions. Celle-ci sera la dernière. Enfin… Je dis ça à chaque fois. » Dans la salle de devoirs surveillés réaménagée spécialement pour l’occasion, Hubert Charuel donne une « master class » un peu particulière au lycée agricole Pixérécourt de Malzéville (Meurthe-et-Moselle). Ce 15 décembre, la venue du réalisateur haut-marnais, maintenue malgré le Covid-19 grâce à la mobilisation de l’équipe pédagogique du lycée, venait conclure en beauté le projet Écologie et quartiers populaires, commencé en partenariat avec Reporterre un an auparavant.

Avec sept élèves du lycée, nous avions réalisé un reportage intitulé « Pour l’agriculture de demain, vive les fermes d’hier ! » qui racontait, en fil rouge, l’histoire d’une transmission entre deux générations de paysans des dernières fermes traditionnelles vosgiennes. Il nous fallait diffuser une belle œuvre qui s’empare de ces questions d’héritage paysan, de reprise d’exploitations familiales, pour que leur court-métrage partage l’affiche en première partie. Les Vaches n’auront plus de nom remplissait toutes les conditions. Tantôt poignantes, tantôt tendres ou tordantes, les généreuses tranches de vie de ce documentaire (52 minutes) filmées caméra à la main ne font que repousser une fin qui est annoncée dès le début par Hubert Charuel : la ferme laitière familiale, à Droyes, en Haute-Marne, est vouée à disparaître.

De Falbala à « numéro 53 »

Lui, le fils unique, ne la reprendra pas. Son père Jean-Paul, usé par trente ans de labeur, n’en peut plus des vaches. Il est déjà en retraite. À cette époque, sa mère Sylvaine a encore trois ans à tirer. L’idée de voir un jour les étables vides la terrifie. Elle parle de suicide, évoque la « chronique d’une mort annoncée ». Derrière la remorque bétaillère qui déménage ses trente vaches par petits groupes, Sylvaine a l’impression de suivre en voiture « un corbillard ». Elles ne vont pourtant pas à l’abattoir, mais à trois kilomètres de là, dans la…

La suite est à lire sur: reporterre.net
Auteur: Franck Dépretz Reporterre