Séismes et répliques : comment assurer la sécurité des secouristes

Deux violents séismes de magnitudes 7,8 et 7,5 ont touché le Sud de la Turquie et le Nord de la Syrie le lundi 6 février 2023 à quelques heures d’intervalle. L’urgence est actuellement à l’assistance aux populations sinistrées et au secours des personnes encore bloquées sous les décombres.

Dans des conditions hivernales et sous des températures négatives, c’est une véritable course contre la montre qui s’est engagée. Une course non sans dangers pour les secouristes. C’est pourquoi nous avons mené une étude visant à la mise en place d’un dispositif d’alerte permettant aux secouristes de se mettre à l’abri le plus rapidement possible en cas de répliques sismiques.

Des secours à haut risque

D’abord conduites de manière spontanée par les habitants et par les équipes de secours locales, ces opérations de « sauvetage déblaiement » sont désormais réalisées par des équipes spécialisées (dites « USAR » pour Unité de sauvetage et de recherche) venues du monde entier en réponse à la demande adressée par les autorités turques et syriennes.

La France a ainsi mobilisé via le mécanisme européen de protection civile deux unités USAR, soit plus de 120 personnes et une dizaine de chiens de recherche.

Par nature, ces interventions se déroulent dans un environnement dégradé et dangereux. Les répliques sismiques constituent à ce titre un risque majeur pour les équipes qui doivent intervenir dans des bâtiments gravement endommagés dont certaines parties peuvent s’effondrer, y compris en cas de secousses sismiques relativement faibles.

La période qui suit la survenue d’un séisme important est en effet caractérisée par une probabilité accrue de séismes – les répliques – qui sont de moindre ampleur que le séisme principal et résultent de réajustements de contraintes le long de la zone de faille. Autrement dit, de petites ruptures ont lieu sur la faille jusqu’à ce que celle-ci retrouve une position stable lui permettant à nouveau d’accumuler des contraintes pendant des centaines d’années jusqu’au prochain séisme d’ampleur.



Read more:
Pourquoi il y a des séismes en cascade en Turquie et en Syrie

Ce phénomène s’illustre avec force en Turquie, puisque les deux séismes du 6 février donnent lieu à un nombre particulièrement élevé de répliques : plus de 400 répliques de magnitude supérieure à 3.0 ont ainsi été enregistrées par le Centre sismologique Euro-Méditerranéen dans les 24 premières heures, avec une dizaine de minutes seulement entre chaque secousse ressentie à des degrés divers la population. Sans être surprenante après des séismes de magnitude supérieure à 7.0, cette activité de répliques est particulièrement élevée.

Télémètre d’alarme pointant vers un bâtiment instable pendant la conduite d’opération de secours par des équipes USAR.

Télémètre d’alarme pointant vers un bâtiment instable pendant la conduite d’opération de secours par des équipes USAR.
S. Auclair, BRGM, Fourni par l’auteur

Bien que ce risque soit bien connu des équipes de sauvetage, elles ne disposent à ce jour que de peu de moyens pour s’en protéger, avec des pratiques très variables d’une équipe à l’autre. L’un des outils les plus utilisés demeure le « télémètre d’alarme » : un faisceau laser est pointé vers un bâtiment instable, et une alerte sonore est émise en cas de déplacement de plusieurs millimètres de la structure, malheureusement souvent trop tard au moment même de l’effondrement !

À défaut de prévoir, alerter au plus vite

Le principe d’alerte sismique précoce a été formulé dès 1868 en Californie, dans l’idée de pouvoir alerter San Francisco de l’imminence de l’arrivée d’ondes destructrices engendrées par des séismes localisés à une centaine de kilomètres de la ville.

En cas de séisme, les ondes « P » (comme « Premières ») – les moins fortes – libérées au niveau de la faille, se propagent dans le sol près de 2 fois plus rapidement que les ondes « S » (comme « Secondes ») qui sont responsables d’une grande partie des dommages, elles-mêmes suivies par d’autres ondes encore plus destructrices. En principe, il « suffit » donc d’analyser les premières secondes d’enregistrement des ondes P pour prédire la puissance du séisme ainsi que la sévérité des secousses à venir. La diffusion de cette…

La suite est à lire sur: theconversation.com
Auteur: Samuel Auclair, Ingénieur en sismologie au BRGM, chef de projet « Gestion de crise ». Auteur du livre « Le séisme sous toutes ses coutures », éd. l’Harmattan, 2019, BRGM