Semaine de quatre jours : autant de travail à faire en moins de temps ?

Depuis plusieurs mois, un regain d’attention est porté sur l’idée de réduire le nombre de jours travaillés par semaine. Pour les emplois traditionnellement proposés sur une semaine de 5 jours, des expérimentations sont en cours dans certains pays européens comme le Royaume-Uni, la Belgique et l’Espagne pour porter la semaine de travail à 4 jours.

Cette réduction du nombre de jours ne signifie pas pour autant une réduction du temps de travail. En effet, la Belgique a choisi fin octobre de proposer aux entreprises et aux salariés de condenser le temps de travail sur quatre jours au lieu de cinq. Cette décision du gouvernement belge est présentée comme un moyen de flexibiliser le marché de l’emploi qualifié de « trop rigide » et de donner l’opportunité aux salariés de mieux concilier leur vie personnelle et professionnelle.

En France, ce sont les entreprises qui peuvent choisir de modifier le nombre de jours travaillés par semaine, tant que les règles de droit sont respectées par ailleurs. En particulier, de grands groupes internationaux implantés en France se sont saisis de cette question pour répondre à des enjeux de fidélisation des salariés.

Réduire les inégalités

Par exemple, le géant du conseil Accenture propose à certains salariés de condenser leurs heures de travail sur 4 jours au lieu de 5. En France, son homologue KPMG propose aux jeunes parents de travailler quatre jours payés cinq pendant six mois afin de répondre à une demande des salariés de passer plus de temps avec leur nouveau-né.

Deux problématiques apparaissent : d’une part, la réduction du nombre de jours travaillés ou la réduction du temps de travail hebdomadaire effective ; d’autre part, le sens d’une réduction du nombre de jours travaillés dans une culture du travail tournée vers la disponibilité permanente des salariés.

En France, la question de la réduction de temps de travail est à l’agenda politique de certains partis de gauche depuis de nombreuses années. Le sujet avait notamment donné lieu à la réforme des 35 heures en 1998. Plus récemment, l’économiste Pierre Larrouturou et la sociologue Dominique Méda ont publié un essai en 2016 pour recommander une norme d’emploi à temps plein de 4 jours et 32 heures travaillés par semaine.

Les arguments politiques défendus sont de deux ordres : une meilleure répartition de l’emploi pour lutter contre le chômage de masse ; et un rapprochement des temps de travail entre les salariés dits à temps plein (35 heures et plus) et les salariés à temps partiel, qui sont le plus souvent des femmes avec charge de famille.

Instaurer une norme de temps de travail à temps plein de 32 heures réparties sur 4 jours permettrait ainsi de réduire les inégalités d’accès à l’emploi à temps plein ainsi qu’une répartition moins genrée des rôles parentaux. En pratique, cela implique que les salariés pour qui le temps plein était de 35 heures sur 5 jours passent à 32 heures sur quatre jours sans perte de salaire.

Une même quantité de travail

En juin 2020, l’entreprise de distribution de matériel informatique LDLC a annoncé mettre en place, par accord collectif, les 32 heures réparties sur quatre jours par semaine sans perte de salaire pour les salariés qui étaient à 35 et 37 heures. Depuis la mise en œuvre effective au 1er janvier 2021, Laurent de la Clergerie, fondateur et dirigeant, a communiqué largement sur les résultats obtenus.

Il a d’abord remarqué des effets de réduction des inégalités de genre comme avancés par Pierre Larrouturou et Dominique Méda. Laurent de la Clergerie note ainsi dans un post sur LinkedIn du 22 avril 2021 :

« Cette mesure avait un côté égalité homme-femme non anticipé, car celles qui étaient à 80 % pour garder leurs enfants le mercredi ont pu retrouver un contrat de travail à 100 % »

Contrairement à ses prévisions, il n’a embauché que 30 personnes supplémentaires sur un effectif initial de 1 030 salariés. Les équipes en place se sont organisées pour délivrer la même quantité de travail en jouant sur la polyvalence des postes et une gestion efficace des plannings.

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Auteur: Marie-Rachel Jacob, Professeur-chercheur en management, EM Lyon