Semezdin Mehmedinovic, poète d’une certaine Europe

Les retrouvailles de Semezdin Mehmedinovic avec Sarajevo ressemblent à celles de deux amis d’enfance, d’inséparables compagnons qui renouent après une longue absence. « Tous les deux, nous avions changé ; il nous a fallu nous réadapter l’un à l’autre », raconte-t-il, la voix un peu sourde, le regard clair à mi-chemin vers la mélancolie.

Ces retrouvailles ont eu lieu en 2019. L’écrivain bosnien, qui vient de passer vingt ans aux États-Unis, se réinstalle dans sa ville natale. Les rues portent de nouveaux noms, de nouvelles têtes s’y promènent. Lui en est resté à l’ancienne toponymie. Et il a gardé sa manie de préférer les petites artères protégées aux larges avenues dégagées. « Je circule encore dans Sarajevo selon ma carte de la guerre, elle est inscrite dans mon corps », explique-t-il. Une carte des snipers et autres tueurs embusqués qui se grave en lui à jamais quand, dans la capitale bosnienne encerclée, Semezdin Mehmedinovic jouait les secouristes.

Siège de Sarajevo

À l’époque, il ne peut se contenter de tourner un film – Mizaldo, kraj teatra, sur la guerre, présenté au Festival de Berlin en 1994. Il ne lui suffit pas non plus d’animer la rédaction de HB Dani, hebdomadaire lancé avec des amis pour faire vivre le pluralisme en ces heures sombres d’exaltation des identités. Il lui faut aider, sauver, rendre service.

Âgé de 64 ans aujourd’hui, Semezdin Mehmedinovic en a 32 quand commence le siège de Sarajevo. Un cauchemar de près de quatre ans dont il aura plusieurs occasions de s’extirper. Mais il choisit de rester et, avec sa femme et son fils, il attendra de pied ferme la fin des hostilités pour partir. Ce sera en 1996, direction les États-Unis, où il produira notamment des émissions pour Reuters et la chaîne allemande ARD.

La guerre, aussi une affaire de propagande

Jusqu’alors, une sorte de nécessité l’avait maintenu dans cette vie en péril. Peut-être parce que…

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Auteur: Marianne Meunier