Cher Jean-François (je me permets de vous appeler uniquement par votre prénom car même si je m’adresse à vous, je ne peux oublier que j’écris dans un journal très lu dans lequel nous devons faire preuve de discrétion), merci pour votre message qui fait suite à ma chronique sur le sentiment d’injustice.
Dans votre commentaire, vous m’invitez à une réflexion philosophique sur l’idée de se rendre justice soi-même et ses conséquences dangereuses pour notre société. Eh bien, vous avez sans doute raison. Mais je ne peux m’empêcher de croire qu’il faut écouter ce sentiment inné du juste que nous pouvons tous ressentir de façon aiguë, surtout dans l’enfance. Il suffit de regarder le visage sourdement indigné d’un enfant témoin d’une injustice. Et je crois que nous devons agir en conséquence, quel qu’en soit le prix, lorsque nous croyons que l’injustice est flagrante et ne concerne pas uniquement notre propre cas (voire pas du tout notre propre situation), mais celle d’un grand nombre de personnes. Il existe ensuite bien des moyens de lutter contre l’injustice. La mienne est pusillanime : je n’ai tout simplement pas l’audace ni le courage de fomenter des révolutions. Je me contente le plus souvent d’écrire et d’agir timidement, par exemple en ne payant pas toujours mon ticket de métro ou en laissant passer avec moi le passager qui n’en a pas.
J’ai un problème avec l’expression : « Si tout le monde faisait comme vous ! », utilisée généralement sur un ton réprobateur pour mettre en cause une personne coupable d’un acte répréhensible. Si tout le monde se mettait à parler à haute voix dans un cinéma, la séance se transformerait en un grand feu de commentaires à propos de ce qui se passe à l’écran, les spectateurs se mettraient à donner des conseils aux acteurs, les rires fuseraient dans les moments tristes et les plus véhéments se lèveraient pour participer aux…
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Auteur: Estelle-Sarah Bulle