Soirée des César : la publicité est la star cachée du cinéma

C’est l’histoire d’une institutrice, Antoinette, amoureuse du père d’une élève. Ils s’aiment, mais l’homme est marié. L’héroïne le suit en cachette pendant ses vacances et parvient, à force de crapahuter dans les montagnes, à le retrouver dans un gîte d’étapes cévenol. À l’heure du dîner, elle tente de cacher son trouble en discutant avec les autres randonneurs. « Si tu aimes les randonnées, j’ai une application pour toi : Visorando », lui lance son voisin de table, avant de chanter les louanges de cette application « géniale » et « très bien faite ». En 52 secondes, son nom est mentionné trois fois. Cette saynète, extraite du long-métrage Antoinette dans les Cévennes, a été visionnée par plus de 750 000 personnes lors de la sortie du film, en 2020. Sans que les spectateurs ne soient jamais avertis du fait qu’il s’agissait d’un placement de produit.

Cette pratique, qui consiste à introduire un produit dans le décor ou le scénario d’un film (on parle alors « d’intégration de marque ») est aussi vieille que le septième art. En 1896, déjà, les frères Lumière mirent au premier plan d’un de leurs films deux caisses de savon de la marque Sunlight. L’arrivée des plateformes de streaming, au début des années 2000, lui a donné des ailes : « D’un seul coup, un certain nombre d’œuvres ont pu toucher une audience globale, dit Jean Patrick Flandé, fondateur de Film Media Consultant, l’une des principales agences françaises de placement de produits. Une série comme Lupin peut être vue par plus de 100 millions de spectateurs. C’est énorme. » « Une publicité dure au maximum six mois, un film dure éternellement, abonde Javier Jiménez, de l’agence Propaganda Gem. Il peut être vu dans n’importe quel pays du monde, à n’importe quel moment. » Une aubaine pour les marques.

Mise en avant de l’application de rencontre Happn dans Nous finirons ensemble de Guillaume Canet, des consoles de jeux vidéo PlayStation dans Play d’Anthony Marciano, des voitures Audi dans Taken, de Pierre Morel… Les exemples sont légion. Si les marques ont tendance à privilégier les productions susceptibles de faire de grosses audiences, les films célébrés par la critique ne font pas exception.

Plusieurs longs-métrages nommés aux César 2022 contiennent ainsi de discrètes promotions : dans Aline, de Valérie Lemercier, l’héroïne voyage à bord d’avions Air France. Le logo de la compagnie aérienne est à plusieurs reprises mis en valeur à l’écran.

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Auteur: Hortense Chauvin Reporterre