Sortir du cercle

L’Europe meurt de ses fruits, pluies acides
de lendemains qui chantent.
Les nouveaux propriétaires en veulent encore !
La privatisation envahit les rêves –
mots creux dans les chaumières.
Il faut quitter ce marché du silence,
ce mensonge de famille, cette arrogance sans-gêne
et son dépôt de plomb dans la croûte terrestre.

Je deviens muette à force d’être tue,
dit une ombre dans la nuit. L’imposition d’un langage
vandalise l’intériorité, l’effroi fait partie de mes chairs…
je me fie à mon instinct – je sors du cercle.
Les données numériques valent plus que nos vies –
je sors du cercle.
Je sors de la superficialité, de ses sourires dociles
aux dents refaites.
Je sors du cercle familial, de ses priorités infanticides,
de sa distribution de rôles à perpétuité.
Ne rien banaliser est mon rempart contre la lâcheté.

La guerre et la paix se passent la balle. Au milieu,
un charnier brûlant est nettoyé tous les matins ;
la vie et la mort sont nettoyées.
Le Tribunal gère ses fidèles, masse molle
d’électeurs consentants.
Chacun prend ses habitudes dans ce village démocratique :
plus la peine de penser, il suffit de remplir sa fonction.
La terre enfle – elle enfle sous des tonnes d’ordures
recyclées pour le bien de la planète.
La Raison dans l’histoire suit son cours et emporte
le temps qu’il reste.

À présent, nous avons les mains coupées,
la langue coupée. Le cercle se referme –
je sors du cercle.
Exil volontaire, évasion de crise.
Les racines du ciel sont calcinées, les arbres
plantés dans un décor sans arbres. On débite du bois à la chaîne…
les mots se blessent en tombant.
Dans le miroir, les reflets du monde gras se mettent à cloquer.
Tout se mélange dans la tête – je sors du cercle.

Se protéger de rien. Seulement
être vivant dans les mots protège.
J’aiguise la pointe du stylet, je tiens
par cette fine forme de sens : une ombre dans la…

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Auteur: dev