Sortir du tout-béton, le défi des architectes

Habitat et urbanisme

Les architectes et urbanistes sont des gens discrets. Hormis une poignée de starchitectes on ne les entend guère. La télévision les ignore. La presse écrite les boude. Et sauf exception l’édition les cantonne à des ouvrages savants au public étroit. C’est dommage car, de par leur profession, ils portent un regard original sur le monde moderne. Les tenir à l’écart c’est se priver d’une expertise bienvenue.

Philippe Madec appartient à cette poignée d’architectes citoyens qui mènent une réflexion sur leur pratique et le sens de leur métier. On apprend beaucoup à l’écouter. À la fois architecte et urbaniste collectionnant les distinctions, acteur engagé (il est l’un des initiateurs du Mouvement pour une frugalité heureuse et créative), enseignant apprécié, essayiste à ses heures, conférencier occasionnel, il réussit dans son dernier livre, Mieux avec moins, à tenir un discours à la fois radical et humaniste, intransigeant sans être désespéré sur la folie d’un monde abruti de béton quand l’urgence climatique commande d’explorer des pistes nouvelles ou d’en redécouvrir d’autres injustement oubliées.

150 tonnes de béton par seconde

Deux ou trois données judicieusement rappelées par l’auteur donnent la mesure du désastre : 40 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (responsables du réchauffement climatique) proviennent du bâtiment ; la production d’une tonne de béton (on en fabrique la bagatelle de 150 tonnes par seconde dans le monde !) entraîne à elle seule l’émission de plus d’une tonne de CO₂. En clair, le sidérurgiste Arcelor-Mittal (principal fournisseur du ferraillage dans lequel est coulé le béton) et le cimentier Lafarge-Holcim — numéro 1 mondial — expédient dans l’atmosphère presque autant de CO₂ que la France !

C’est peu dire que Philippe Madec a la dent dure contre ce qu’il appelle « la monoculture du béton » menée au nom de la « modernité » et généralisée par la reconstruction de l’Europe post Seconde Guerre mondiale. Moyennant une poignée d’inventions (l’ascenseur, le climatiseur…) elle a abouti entre autres résultats à la prolifération à l’échelle mondiale des tours d’habitations et de bureaux que l’auteur résume ainsi : « Une structure en béton armé de ciment Portland habillée de quatre façades semblables ou presque, idéalement pourvues de murs rideaux en verre ou autres, et le tout climatisé. » Et d’ajouter : « Cet objet type, ce bâtiment…

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Auteur: Reporterre