Sous la neige, un écosystème fascinant en voie de disparition

Les Samis de Laponie l’appellent « skoavdi ». Les écologues, « subnivium ». Comprendre : l’épaisse couche de neige sous laquelle un grand nombre d’espèces se réfugient l’hiver venu pour survivre aux températures glaciales. Un écosystème saisonnier vital, méconnu, et aujourd’hui menacé par le changement climatique.

Pour beaucoup, le manteau neigeux n’est qu’un espace stérile, homogène et silencieux. Un amas de flocons brillants où s’enfoncer dans un craquement feutré. Qui pourrait imaginer que des belettes y chassent, que des hermines y cavalent et que des porcs-épics s’y terrent pendant plusieurs mois ? « On trouve dans le subnivium une biodiversité extraordinaire, explique Jonathan Pauli, professeur à l’université du Wisconsin (États-Unis) et auteur de plusieurs études sur le sujet. Certaines espèces, comme les lemmings [de petits rongeurs vivant notamment dans les toundras norvégiennes], se reproduisent même sous la neige. »

Preuve de la vitalité stupéfiante de cet habitat, qui recouvre chaque hiver 24 millions de km2 de l’hémisphère Nord : en 2015, une équipe de chercheurs a dissimulé des caméras dans la poudreuse de l’île d’Håkøya, en Norvège. Une multitude de musaraignes, campagnols et autres mustélidés ont été filmés gambadant sous la neige. « Les petits mammifères construisent des tunnels dans le subnivium, commente Kimberly Thompson, chercheuse au Centre allemand de recherche intégrative sur la biodiversité. Leur forme cylindrique leur permet d’y courir efficacement. C’est comme un labyrinthe caché. »

Au royaume du subnivium vivent également de nombreux insectes, reptiles et amphibiens. Le lys des glaciers, une espèce de plante originaire de l’ouest de l’Amérique du Nord, parvient même à y pousser en captant les rayons du soleil à travers les cristaux glacés. Certains oiseaux, comme les perdrix blanches, aiment s’y tapir en cas de grand froid. Les renards, eux, patientent longuement à sa surface, à l’affût du moindre bruit trahissant la présence d’une proie.

Pourquoi un tel engouement ? « Lorsque la neige s’accumule sur plus de 20 cm de hauteur, un réseau de cristaux de glace se met en place, explique Kimberly Thompson. Lorsqu’ils sont bien espacés les uns des autres, des poches d’air se forment. La chaleur évacuée par le sol se retrouve emprisonnée à l’intérieur. » Qu’il fasse -5, -10 ou -40 °C dehors, la température du subnivium reste stable, autour de 0 °C. « Cela permet aux animaux et aux plantes de se protéger des conditions hostiles », poursuit la chercheuse.

« La neige ne tombe plus »

Le changement climatique met en péril cet équilibre. Depuis les années 1980, l’étendue des…

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Auteur: Hortense Chauvin Reporterre