Spectacle fasciste

Le retour de violents affects identitaires nourris de nationalisme, de racisme et de fanatisme religieux laisse entendre que le fascisme représenterait bien plus qu’un ensemble d’ennemis que l’on saurait identifier et combattre. S’agit-il d’une sorte de maladie se lovant dans les replis psychiques de la subjectivité « néolibérale » mutilée ? L’absence de partis de masse qui s’en revendiquent explicitement, exception faite du Bharatiya Janata Party indien, ne nous autorise pas à supposer que le fascisme serait disparu. Il est revenu de toute évidence, mais sous une forme curieusement évaporée, étalée sur les réseaux sociaux et incarnée par des chefs pops médiocres qui lui donnent une apparence encore plus contradictoire et rétrograde que dans les années 1930.

L’initiative individuelle et le marché règnent sans partage après quarante ans de capitalisme néolibéral mondialisé, mais face à l’escalade des conflits et la crise interminable, ils réclament un État fort pour réprimer les éléments racisés – migrants, musulmans, mexicains, juifs, etc. – au sein des classes dangereuses. Les dégâts économiques et le chômage issus de la pandémie de COVID-19 n’ont fait qu’empirer les choses. Pour empêcher un véritable changement de paradigme qui nous permettrait de quitter la « société animale stabilisée », c’est-à-dire tous les dispositifs et les modes de vie qui font de notre espèce un animal incapable de se reproduire hors du capital et du travail salarié, – resurgit le fascisme, mobilisant par son nationalisme agressif les forces sociales de la société de masse fragmentée.

Nous vivons une crise prolongée depuis quarante ou cinquante ans. Elle était longtemps masquée sous des sommes impressionnantes de crédit et la modernisation locale de l’Asie du Sud-Est. Mais en 2007-2008 la crise éclata au grand jour, devenant la nouvelle norme. Ce qui avait commencé comme une crise financière mais qui était en réalité une crise économique s’est rapidement transformé en crise aussi bien politique que sociale, alors que les gouvernements, incapables d’ajuster leurs politiques, poursuivaient tout bonnement les mêmes pratiques : un mélange fragile d’austérité et d’impression d’argent (pour les banques). Le résultat vida le système démocratique national, servant prioritairement les intérêts des entreprises et d’une petite élite, de ce qu’il lui restait de substance. Les dernières dix années virent le retour aussi bien d’un mouvement de révolte…

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Auteur: lundimatin