Stockage de CO2 : les manœuvres de Total [1/5]

[Total, le premier pollueur de France 1/5] Total présentera, le 28 mai prochain, une résolution sur le climat à ses actionnaires. Enquête sur la stratégie pas vraiment verte d’une compagnie qui émet autant de CO2 que toute la France.
• Volet 2 : Face à la fronde d’actionnaires, Total dégaine sa « stratégie verte »


Total tente de tirer profit de la réforme du marché du carbone européen pour poursuivre ses activités fossiles tout en se drapant de vert. Aller chercher du pétrole tout au fond des puits, c’est ce que cherchent à faire les compagnies pétrolières alors que les gisements classiques ont tendance à s’épuiser. Certaines parviennent même à obtenir de l’argent de l’État pour cela, comme aux États-Unis, ce qui peut sembler étonnant au regard de l’urgence climatique. La martingale consiste à utiliser un gaz à effet de serre, le dioxyde de carbone (CO2), pour cette opération. Le gaz injecté à haute pression permet en effet de déloger les huiles et le gaz naturel éventuellement coincés dans des recoins de puits, voire de modifier la consistance d’huiles trop visqueuses. Le CO2 peut aussi être simplement injecté dans un puits vide, dans l’espoir de l’éliminer durablement de l’atmosphère. C’est ce que Total cherche à obtenir au niveau européen, notamment au Royaume-Uni et en Norvège, en s’inspirant de l’exemple étasunien.

Aux États-Unis, les compagnies pétrolières qui ont recours à cette technique nommée enhanced oil recovery (EOR), ou « récupération améliorée du pétrole », sont récompensées. En application de l’article 45Q du Code des impôts étasunien, elles obtiennent un crédit d’impôt de 35 dollars par tonne de CO2 utilisée, durant douze ans. Le plus souvent, le dioxyde de carbone est injecté pour mieux récupérer les hydrocarbures. Dans ce cas, le gaz retourne directement dans l’atmosphère. Le bénéfice de cet article 45Q du Code des impôts est donc nul pour le climat, voire dangereux, puisqu’il augmente le volume d’énergies fossiles disponibles.

Le même article prévoit un crédit d’impôt de 50 dollars lorsque le CO2 reste stocké sous terre. Le stockage de CO2 fait sens en théorie, mais il n’existe aucune garantie à moyen terme qu’il reste bien sous terre et ne s’échappe pas.

L’administration de Joe Biden souhaite d’ailleurs revoir ce Code des impôts, qui accorde beaucoup d’avantages au secteur des énergies fossiles. Le nouveau président des États-Unis a engagé son pays à réduire ses émissions de CO2 de 50…

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Auteur: Alexandre-Reza Kokabi (Reporterre), Aline Robert Reporterre