Ce reportage, réalisé entre novembre 2020 et février 2021, nous prend aux tripes. Pour Basta !, Pedro Brito Da Fonseca (journaliste réalisateur et photographe) a passé plusieurs nuits pendant cette période auprès des réfugiés qui habitent, faute d’autres solutions, des campements sommaires installés dans le bois de Puythouck, à Grande-Synthe, dans la périphérie de Dunkerque. Ces exilés sont principalement des Kurdes irakiens et iraniens ou des Afghans, beaucoup de jeunes hommes seuls mais également quelques familles avec enfants. Ils y survivent, malgré le froid hivernal, dans des tentes ou sous des bâches fournies par des associations de solidarité, en attendant de tenter leur chance pour franchir la Manche. L’histoire que Pedro nous raconte illustre l’absolue absurdité de la situation : le campement est très régulièrement démantelé sur ordre de la Préfecture, des entreprises privées sont mandatées pour détruire partiellement ou totalement les tentes, avant que les exilés ne se réinstallent pour de nouvelles nuits glaciales… jusqu’au prochain démantèlement. Les photos de Pedro montrent l’ampleur de cette violence feutrée que subissent les exilés – dont certains ont été persécutés dans leur pays – dans cette sorte de no man’s land physique et moral, indigne d’un pays comme la France. Précisons que depuis fin décembre, il est interdit aux journalistes de documenter ce type d’opération de police (cette interdiction a été confirmée par le Conseil d’État début février). Même le travail de Pedro est donc hors-la-loi.
Ivan du Roy
Un camp d’exilés dans le bois du Puythouck, à Grande Synthe. Depuis plusieurs années, des évacuations ont lieu régulièrement. Fin décembre, plusieurs journalistes n’ont pas été autorisés par les forces de l’ordre à accéder au campement pour documenter les opérations d’évacuation. Ce 7 janvier, un policier tente d’empêcher la prise de vue.
Les évacuations ont lieu plusieurs fois par semaine. Les forces de l’ordre interviennent avec une entreprise locale privée, mandatée par l’État, et chargée de détruire les tentes. Les employés de l’entreprise privée travaillent avec combinaison blanche et masque en raison de la pandémie du Covid-19.
Deux bougies brûlent dans les chaussures de Bilal, pour tenter de les réchauffer. Dans le campement, plusieurs centaines d’exilés vivent dans une extrême précarité en attendant de pouvoir passer illégalement en Angleterre. En janvier, la température moyenne était de 6…