Suspendre la destruction des forêts – Pistes pour une révolution décoloniale

Pour beaucoup d’entre nous, le monde semble impossible à ressaisir. La destruction de la vie apparaît comme un train fonçant à toute allure vers le néant, tiré par la locomotive infernale de la modernité. Même les formes dominantes de contestation semblent périmées et incapables, ne serait-ce que pour un instant, de suspendre la progression de la catastrophe.

En 2017, dans le premier numéro du journal des Comités de défense et de décolonisation des territoires, nous avions proposé un plan d’action : enquêter, construire l’autonomie et bloquer les flux. Cette formule s’avère aujourd’hui toujours aussi pertinente. Nous l’avons d’ailleurs appliquée à plusieurs situations au cours des dernières années. 

En effet, avant de bloquer un projet, il faut tout d’abord enquêter, définir les intérêts politiques et financiers se cachant derrière la façade croulante du progrès économique. Il faut repérer les points d’entrée et de sortie des lieux ou des situations ; apprendre à reconnaitre les ami∙e∙s et les ennemi∙e∙s ; trouver une manière de se lier aux personnes qui habitent un territoire et qui luttent pour le défendre ; comprendre et partager ce qu’elles aiment, et haïr avec elles ce qui les menace. En même temps, il faut aussi construire l’autonomie. C’est-à-dire réunir les forces pour combattre le saccage des territoires, faire grandir les mondes que nous sommes. Rendre plus puissant le parti de la vie qui s’oppose à l’économie de la mort. Cette idée doit être comprise de manière stratégique autant au niveau des relations que des infrastructures. Cependant, afin de stopper définitivement la progression de la catastrophe et de saper irrémédiablement la souveraineté coloniale et son infrastructure extractiviste, il nous faut pousser plus loin notre réflexion politique. Le sous-titre d’un article du premier numéro de notre journal empruntait l’expression zapatiste : « Avancer en questionnant ». Il était alors clair pour nous que la mise en place de nouvelles propositions exigerait du temps. 

Chez les communautés autochtones zapatistes du « Mexique », il existe d’ailleurs trois formes de temps qui se superposent. D’abord, le temps exact, celui qui quadrille nos vies et tente de synchroniser le monde entier, le temps de l’horloge qui organise l’économie et les dispositifs disciplinaires. Il y a ensuite le temps juste que dicte la forêt et qui donne son organisation à la communauté. C’est le temps rythmé par le soleil et les…

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Auteur: lundimatin