« Tenir tous les bouts, reconstruire un syndicalisme de lutte de classes ». Entretien avec Laurent Brun

Dans cet entretien en date du 6 mars 2023, Stathis Kouvélakis, philosophe marxiste membre de la rédaction de Contretemps, et Laurent Brun, secrétaire de la fédération CGT des cheminots, posent les premiers jalons d’un bilan de la séquence de janvier-février 2023 de la mobilisation sociale, analysent les forces et limites de la stratégie de l’intersyndicale et esquissent quelques pistes nécessaires pour étendre le mouvement, notamment parmi la jeunesse, et élargir les revendications.

***

Un bilan de la séquence de janvier-février 2023 de la mobilisation sociale contre la réforme des retraites.

Stathis Kouvélakis : Nous sommes à la veille de la deuxième séquence du mouvement. Je voudrais commencer par un retour sur la séquence précédente, tout d’abord dans ton secteur, la SNCF. Quel est le bilan que tu tires des cinq journées de mobilisation de janvier et février ? Quels ont été les points forts et les points faibles du mouvement ? Quels en sont les éléments nouveaux, s’il y en a, par rapport aux mobilisations précédentes ?

Laurent Brun : Le point fort, c’est évidemment le niveau de mobilisation, qui est très élevé, tous collèges confondus, y compris dans l’encadrement, voire même dans l’encadrement supérieur. Le point plus problématique, c’est l’affaiblissement de la participation à la grève au fil des journées d’action. Cela ne signifie pas un abandon de la bataille, c’est plutôt lié à une usure des séquences grévistes ponctuelles. Certes, une partie des salariés ne ressentent pas cette usure, parce que c’est leur premier grand conflit. Mais pour la plupart des cheminots, la multiplication de journées isolées, au bout d’un moment, ça commence à bien faire ! Malgré tout, on était au-dessus de 30 % de participation, un niveau équivalent à celui de très bonnes journées d’action classiques. Sur la première journée d’action, on était à 50 % tout collèges confondus, ce qui veut dire 80 à 90 % pour les salariés de l’exécution, et 30 % pour l’encadrement. C’est vraiment énorme. 

Ceci dit, en tant que CGT cheminots, on s’est posé dès le début la question de l’élargissement de la mobilisation, au-delà de ce que proposait l’intersyndicale de la SNCF. Cette intersyndicale est calée depuis le début sur le cadre interprofessionnel au niveau confédéral, notamment du fait de la CFDT qui ne voulait absolument pas déborder de ce cadre, du moins dans un premier temps.

De notre côté, on a essayé de reproduire ce qu’on avait fait en 2018,…

La suite est à lire sur: www.contretemps.eu
Auteur: redaction