TGV Paris-Lyon : un an après, l’arrivée de Trenitalia rime-t-elle effectivement avec prix plus bas ?

La crise liée au coronavirus en avait retardé l’échéance. Pour la première fois, le 18 décembre 2021, un train d’une compagnie étrangère reliait deux villes françaises après plus de 80 ans de monopole par la SNCF. Une rame Frecciarossa du transporteur Trenitalia quittait Paris pour Milan, desservant au passage Lyon-Part Dieu, Chambéry et Modane du côté français des Alpes. Deux allers-retours quotidiens pour commencer, puis trois à partir du mois d’avril et cinq deux mois plus tard, les trois derniers seulement entre Paris et Lyon.

L’ouverture à la concurrence, promettait l’Union européenne, devait offrir au consommateur une qualité de service renforcée à des prix plus attractifs en obligeant un opérateur en situation de monopole à comprimer ses marges. Nos travaux de recherche synthétisant plusieurs observations faites sur le Vieux Continent tendaient à montrer que l’hypothèse semblait vérifiée avec des écarts plus ou moins importants selon les pays.

Un an après, qu’en est-il sur la ligne à grande vitesse Paris-Lyon, la plus ancienne et la plus empruntée d’Europe (44 millions de passagers en 2019) ?

Plus de trains pour des prix maîtrisés

Pour distinguer les effets de l’arrivée d’un nouvel opérateur de ceux du Covid, dont nous avions montré qu’il avait donné en moyenne lieu à une baisse des prix, nous avons, dans nos travaux récents, isolé quatre périodes d’un mois : pandémie ou non, monopole ou non, les quatre cas de figure étaient représentés et nous ont offert des éléments de comparaison.

Avec pareil objectif, un autre élément de comparaison a également été utilisé, la liaison Paris-Bordeaux sur laquelle la SNCF est toujours seule à faire rouler ses trains. Les temps de trajets y sont similaires à l’axe Paris-Lyon et on retrouve dans les deux cas un vaste arrière-pays desservi par les trains (Marseille, Nice ou Grenoble, côté lyonnais ; Toulouse, Tarbes ou Hendaye, côté girondin).

Les résultats montrent que le nouvel arrivant a rempli son rôle, en proposant des prix 30 à 60 % inférieurs face à l’opérateur historique et en augmentant son offre de deux à cinq allers-retours quotidiens. Du côté de la SNCF, le nombre de TGV inOui a retrouvé son niveau de 2019 tandis que les prix ont baissé de 20 % entre octobre 2019 et octobre 2022. L’offre Ouigo est quant à elle également restée stable avec une baisse des prix plus modérée de 13 %.

Au total, cela donne entre Lyon et Paris 15 % de trains en plus et 23 % de réduction sur les billets, ce qui semble positif et s’inscrit au profit des usagers. Sur le Paris-Bordeaux, ces chiffres sont respectivement de + 18 % pour la fréquence et + 4 % pour les prix témoignant d’un engouement pour cette destination mais aussi, très vraisemblablement, d’un rattrapage sur les prix en situation post-Covid, ce à quoi l’axe Paris-Lyon semble avoir échappé.

Est-ce à mettre au crédit de la concurrence ? Qu’il s’agisse des prix ou de la fréquence, ces résultats globaux appellent un peu de nuance.

Tout en contraste

Pour ce qui est de la fréquence, l’accroissement des trafics sur Paris-Lyon résulte exclusivement des cinq nouvelles rames Trenitalia. Cela peut être vu comme un succès mais aussi comme une stratégie de retenue de la part de la SNCF, qui pendant ce temps augmentait son offre sur l’axe Paris-Bordeaux. Sans concurrence, rien ne laisse à penser que les résultats auraient été moins bons pour Paris-Lyon dans une année 2022 cumulant les records de fréquentation.

L’effet sur les prix, lui, est plus prononcé encore si l’on compare les trajets en inOui et en Trenitalia, qui jouent dans la même catégorie en matière de confort : respectivement 71,20 € en moyenne contre 37,40 € en octobre 2022, soit un delta de 47 %. Reste que cette différence peut s’expliquer à partir de deux éléments dont dépend sans doute l’avenir de l’écart observé : les avantages à l’installation dont bénéficie Trenitalia et ses difficultés de positionnement vis-à-vis de la clientèle professionnelle par un volume et une grille horaire encore trop peu attractifs.

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Concernant les avantages, Trenitalia a obtenu une réduction des péages à verser pour ses…

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Auteur: Florent Laroche, Maître de conférence en économie, Université Lumière Lyon 2