Tirs de LBD : un trou dans le droit français

 

Nous publions ici la première enquête de Flagrant Déni, média indépendant qui documente les activités policières vécues « du mauvais côté de la matraque ». Dans cet article extrêmement fouillé, il se pose la question suivante : riposter au LBD face à des jets de projectiles léger est-il légal ?

 

7mars 2020, acte 69 des Gilets jaunes à Lyon, 14h17min58sec. L’enquête de l’IGPN est formelle : les policiers essuient de « nombreux jets de projectiles », essentiellement des « pétards », mais ne déplorent « pas de blessé ». Pourtant, ils tirent à coups de LBD. 22 secondes plus tard, Noé, 16 ans, sort d’un nuage de lacrymos la bouche en sang et la mâchoire fracturée. Ce cas de figure classique, dans lequel le LBD « riposte » à des projectiles légers, est-il légal ? Aussi fou que cela puisse paraître, cette question de droit n’est toujours pas réglée en France. Pourtant, utilisés de façon de plus en plus intensive depuis 1995ces bien mal nommés lanceurs de balles « de défense » sont unanimement critiqués pour leur dangerosité par le Défenseur des droits, le Conseil d’Etat et même l’ONU.

En France, la loi prévoit que l’usage d’une arme par les forces de sécurité doit toujours répondre à deux conditions : la « stricte proportionnalité » et l’« absolue nécessité ». Les textes n’étant pas plus clairs, il appartient aux tribunaux de préciser, par le biais de la jurisprudence, les cas dans lesquels ces deux conditions sont réunies, ou pas. Par exemple, la Cour de cassation (la plus haute juridiction pénale en France, qui a donc le dernier mot), a estimé en octobre 2021 que l’usage d’une matraque pour interpeller une personne qui « prenait la fuite » était illégal. Depuis octobre 2021, les forces de l’ordre n’ont plus le droit de pratiquer un tel geste dans de telles circonstances. L’impact de la jurisprudence sur les pratiques policières est donc théoriquement énorme.

 

Silence dans les revues juridiques

 

Le problème, c’est que la Cour de cassation ne s’est pour l’heure pas prononcée sur la question de la « nécessité » et de la « proportionnalité » des tirs de LBD. En l’absence d’une décision « suprême », les cours d’appels et même les tribunaux (situés à un niveau inférieur) peuvent faire jurisprudence. Il faut pour cela qu’ils aient statué définitivement dans le dossier qui leur est soumis. S’il n’y a plus de recours possible dans l’affaire, la décision fixe la règle…

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Auteur: La rédaction