Tout doit disparaître

La victoire du Sinn Féin à l’Assemblée d’Irlande du Nord remet la question nord-irlandaise au centre de l’actualité. Propulsée au devant des luttes internationales dans les années 1980 par les grévistes de la faim républicains, elle avait été reléguée au second plan après les accords de paix de 1998. Affaire réglée. Aujourd’hui, le sujet revient. Il est traité par les médias français et nord-irlandais comme un conflit violent, passé, qui risque de resurgir. Comme une figure-repoussoir du passé qu’il s’agit de contenir par tous les moyens. À ce titre, le volontarisme de l’État nord-irlandais, épaulé par ses institutions artistiques, dans la mise sous cloche des mémoires des deux principaux acteurs du conflits, républicains et loyalistes, prépare l’arrivée du monde des affaires et du commerce international en Irlande du Nord depuis les années 2000. Mais les tensions ethnico-religieuses perdurent : l’imposition dans la sphère publique d’un agencement mémoriel hors-sol correspond seulement aux besoins du libéralisme. Une paix de surface qui ne répond pas aux besoins des couches subalternes de la population mais qui permet aux entreprises de s’installer. Le libéralisme en Irlande du Nord s’est imposé ces deux dernières décennies par différents dispositifs qui, s’il divergent par la forme, ont en commun cet objectif : faire taire les dissensus.

Cet article vient de paraître dans le troisième numéro de l’excellente revue papier Parades.

« Le monde a vu le meilleur de l’Irlande du Nord, et ensemble nous ferons tout notre possible pour que cela reste un endroit propice pour y investir et y faire des affaires »
Bilan du G8 de 2013, Irlande du Nord

Belfast, XXIe siècle

« Vous avez réservé ?
– Oui, McGill, pour deux nuits.
– J’aurai besoin d’un passeport pour la caution ».
Passeport. Tiroir. Tour du propriétaire. Clé de la chambre. Digressions faussement amicales sur les origines géographiques de McGill. McGill est Canadien, Australien, États-Unien, Européen – beaucoup moins Africain. Tout se vend dans une auberge de jeunesse. Les chambres, la propreté, l’ambiance, nos corps, nos idées et notre bonne humeur, nos aventures amoureuses et nos identités attendues. Le manager y veille, anxieux. Tout ce subtil mélange implique un retour sur investissement, une réputation, des étoiles sur tripadvisor. Ici on se mélange, mais comme il faut. Et il faut faire la fête, il faut être jeune. Il faut correspondre aux espérances identitaires des touristes….

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Auteur: lundimatin