« Très chers élus », une BD qui explore les rapports entre argent et pouvoir …

Pourquoi avoir choisi de restituer votre enquête sous forme de bande dessinée ?

Cela fait cinq ans que l’on travaille en duo avec Sylvain Tronchet sur les questions de financement, avec, pour point de départ, l’enquête sur les assistants parlementaires du MoDem, qui avait notamment conduit à la démission de François Bayrou. Ces sujets d’investigations sont souvent arides et techniques. La bande dessinée permet de vulgariser sans trop simplifier. C’est une forme narrative intéressante pour toucher un nouveau public.

Vous y apparaissez, dialoguant avec un M. X. Est-ce une personne en particulier ou un ensemble de sources ?

Il fallait un fil narratif. Ce M. X est une idée du dessinateur. C’est un personnage fictif, qui est la somme des nombreux témoins que nous avons pu rencontrer et qui nous ont raconté, souvent de manière anonyme, ce qu’il se passait dans les arrière-cuisines des partis politiques.

Votre ouvrage retrace 40 années de vie politique française sous l’angle de son financement, avec son lot d’affaires marquantes. Quel est, pour vous, l’épisode le plus rocambolesque ?

Celui qui nous a le plus marqués, c’est celui de la présidentielle de 1995. 25 ans après les faits, nous avons été les premiers à avoir accès aux comptes rendus du Conseil constitutionnel, qui était chargé à cette époque de valider les comptes des candidats. C’est une campagne où beaucoup d’argent liquide, de provenance incertaine, a circulé. On se doutait qu’il y a avait eu une forme de tambouille pour valider les comptes d’Édouard Balladur. Mais, en épluchant l’intégralité des PV du Conseil constitutionnel, nous avons découvert l’étendue des manœuvres pour sauver Jacques Chirac, dont les comptes présentaient aussi de graves anomalies. Que les garants de notre Constitution (qui n’étaient pas unanimes sur la question) aient pu se livrer à de telles manipulations, au motif de ne pas déstabiliser la République, est assez incroyable.

Cette histoire pose une question. Peut-on vraiment imaginer qu’on puisse invalider les comptes d’un président élu ?

Depuis, on a créé une commission des comptes de campagne. Mais les failles restent les mêmes. Les comptes des candidats à la présidentielle sont examinés a posteriori, bien après l’élection. Quelles que soient les irrégularités constatées, le président élu sera protégé le temps de son mandat, puisqu’il bénéficie d’une immunité. Dans certains pays, l’organisme de contrôle peut demander les factures en temps réel, pendant la…

La suite est à lire sur: www.prendreparti.com
Auteur: Claude Morizur