Trois ans après Lubrizol, les autorités ont-elles amélioré la prévention des accidents industriels ?

Paul Poulain

Spécialiste des risques industriels

Après l’incendie de Lubrizol du 26 septembre 2019, de nombreux travaux parlementaires ont été réalisés dans le but d’améliorer la prévention des risques industriels. L’incendie des batteries de l’entreprise Bolloré Logistics dans un entrepôt près de Rouen le 16 janvier a remis le sujet des risques industriels sur la table.

Pour rappel, les objectifs de maîtrise des risques industriels sont de diminuer le nombre d’accidents et leur gravité : il faut faire en sorte, par exemple, qu’une seule cellule d’un bâtiment brûle plutôt que l’usine entière, et gérer correctement la crise générée par les accidents majeurs.

Trois ans après Lubrizol, les dernières statistiques des sapeurs-pompiers sont encourageantes. En 2021, il y a eu 58 491 accidents industriels sur des installations classées pour la protection de l’environnement (usines, entrepôts et exploitations agricoles) dont 5037 incendies. En 2020, on dénombrait 60 510 accidents industriels dont 6750 incendies et en 2019, 68 274 accidents industriels dont 7419 incendies. Les accidents ont donc baissé de 14 % et les incendies de 25 % en deux ans. Entre 2014 et 2019, les interventions des pompiers lors d’accidents avaient au contraire augmenté de 20 %. Nous avons donc réussi à inverser la tendance, ce qui peut s’expliquer par une meilleure culture de la sécurité au sein des sites dangereux.

Près d’un incendie sur deux aurait pu être évité

Mais ces chiffres encourageants ne doivent pas nous endormir. Nous pouvons aller beaucoup plus loin. À partir des données du ministère de la Transition écologique et d’assureurs, j’ai pu estimer que près d’un incendie sur deux aurait pu être évité si les recommandations de l’assureur ou de l’inspecteur des installations classées mandaté par l’État avaient été respectées. Pour appliquer ces mesures, nous aurions besoin d’une autorité de sûreté indépendante pour tous les risques technologiques, et pas uniquement pour le nucléaire comme c’est le cas aujourd’hui.

Il est urgent de créer une autorité de sûreté indépendante pour tous les risques technologiques

C’est le préfet qui fait appliquer la loi sur les risques technologiques. Celui-ci doit se préoccuper du développement économique de son territoire et de la sécurité de sa population, ce qui le place dans une position délicate.

À la suite de l’accident de Lubrizol, le rapport de la commission d’enquête du Sénat a souligné que :…

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Auteur: Paul Poulain