Ukraine : des malentendus à la tragédie

Éditorial de février 2022

L’agression commise par la Russie contre l’Ukraine, au mépris absolu du droit international, suscite en Europe un effroi et une indignation parfaitement justifiés. Les marques de solidarités succèdent aux condamnations, bien qu’un sentiment d’impuissance finisse par l’emporter, en dépit des salves de sanctions prononcées par les États occidentaux contre Moscou ces dernières heures. À cette crise majeure, dont l’avenir seul décidera s’il s’agit de la plus grave depuis 1945, il faudra trouver une solution immédiate et tirer des leçons sur le long terme.

Le premier pas vers la sortie du conflit implique d’en comprendre les causes complexes. Une schématisation s’opère sous le coup de l’émotion, appuyée sur le récit confortable d’une jeune démocratie dévorée par l’ogre impérialiste qu’effrayait un vent de liberté dans son voisinage. La propagande russe, pire encore, place l’invasion de l’Ukraine sous la bannière de l’intervention humanitaire visant à arrêter un « génocide » commis sur les populations russophones du pays et à « dénazifier » celui-ci… La guerre qui fait rage ne résulte pas d’un coup de folie de Vladimir Poutine. Elle couvait depuis l’indépendance de ce pays en 1991 compte tenu de sa démographie, puisqu’il comprend une importante minorité de russophones (17 % de la population) concentrés dans les régions de l’est et du sud. L’instabilité politique, la corruption et les luttes d’influence étrangères sont aussi les marques d’une Ukraine qui a connu deux révolutions au cours des dix-huit dernières années (2004 et 2014) et qui n’est pas la démocratie modèle aujourd’hui décrite avec complaisance.

Moscou n’a jamais accepté que l’Ukraine devienne un terrain de jeu de l’Union européenne et des États-Unis plutôt que de constituer, dans le prolongement de la Biélorussie, une grande « zone tampon » dépourvue de bases, de troupes et de missiles déployés par l’OTAN et propice à des échanges commerciaux privilégiés. De plus, le soulèvement de Maïdan, à l’origine du renversement du gouvernement pro-russe de Viktor Ianoukovitch en février 2014 n’a pas été digéré par la Russie, qui a soupçonné les Occidentaux d’avoir instrumentalisé les manifestations. Se sont ensuivis la « proclamation d’indépendance » et le rattachement de la Crimée à la Russie, puis la constitution des deux républiques autonomes pro-russes du Donbass et de Louhansk. Le protocole de Minsk,…

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Auteur: Pierre-Henri Paulet