Ukraine : « la rage » d'Ilyess El-Kortbi, activiste climat en exil

Pas besoin de préciser la date à laquelle sa vie a été mise en pièces. En l’évoquant, Ilyess El-Kortbi se contente d’un sobre « le 24 ». Entendre : le 24 février 2022, début de l’invasion de l’armée russe en Ukraine. L’activiste climat de 25 ans, originaire de Kharkiv, était dans un train de nuit en direction de Kiev, où iel devait participer à une conférence sur la paix. « Je me suis réveillé·e, et dans ma cabine, tout le monde était silencieux. Comme s’ils avaient une ombre sur leurs visages. Je leur ai demandé ce qu’il se passait. Ils m’ont dit que des troupes russes étaient à la frontière. » En quelques secondes, raconte l’activiste, « le monde s’est renversé. J’étais un peu choqué·e, je me suis dit qu’il ne fallait pas paniquer. Mais ce que je sentais, c’était la rage. Car ça n’aurait pas dû arriver ».

Si le chaos climatique avait été pris au sérieux, si l’Europe avait mis fin à son addiction aux produits fossiles à temps, Vladimir Poutine n’aurait pas pu financer cette « guerre fossile », pense Ilyess El-Kortbi. L’activiste n’aurait pas eu à quitter sa ville, sa famille, son quotidien. La place où se trouvait son appartement n’aurait pas été détruite. Ses trois amis décédés à Kharkiv répondraient à ses appels. L’Ukraine ne compterait pas des milliers de morts civils, et près de 7 millions de réfugiés.

Ilyess El-Kortbi a participé à la manifestion sur la taxonomie européenne à Strasbourg le 5 juillet 2022. © Adrien Labit / Reporterre

Rien qu’en 2019, l’exportation de produits fossiles a rapporté plus de 230 milliards de dollars à l’État russe. Il s’agit de la première source de revenus du régime. Entre fin février et mars 2022, l’Europe lui a acheté pour près de 17 milliards d’euros de gaz et de pétrole. Avec ses camarades de Fridays for Future, Ilyess El-Kortbi réclame depuis plusieurs mois un embargo. « Ce n’est pas du gaz qui coule dans les gazoducs », insiste l’activiste, ses yeux marron plantés dans les nôtres. C’est le sang des Ukrainiens. »

« Je n’ai pas d’espoir pour les politiciens, j’ai de l’espoir quand il y a des manifestations »

Le jour de notre rencontre, dans un café douillet du centre de Strasbourg, Ilyess El-Kortbi sort tout juste de plusieurs jours d’actions contre l’inclusion du nucléaire et du gaz dans la taxonomie européenne. Pour l’occasion, l’activiste avait fait le déplacement depuis Berlin, où iel est réfugié·e. Malgré les supplications…

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Auteur: Hortense Chauvin Reporterre