Un moindre mal

Mot après mot
la construction de la haine
comme une ville fantôme, peuplée seulement
d’ombres passant sur les murs,
comme la plus cruelle des lanternes chinoises
parce que l’homme est moins qu’une ombre,
c’est juste une erreur, une passion trouble
ou vile, et le poème est fait
pour ne pas pleurer encore.
Leopoldo María Panero

Que tombe et roule chacune de leurs têtes, m’a-t-il calmement exprimé. L’une après l’autre. Nul besoin d’un juge ou d’un tribunal, serait-il « populaire » ou encore d’exception, leur culpabilité est plus que certaine, plus qu’avérée. Leurs méfaits sont multiples, répétés, de toutes sortes, connus, méconnus, soupçonnés, insoupçonnés.

Plus d’un meurtre commis, fut-il perpétré « avant », à dessein ou « involontairement », plus d’un détournement, des fonds publics aux aides régionales et internationales, plus d’un pourcentage négocié avec acharnement, obtenu, au dépend de la collectivité bien évidemment, quelle qu’elle soit, camouflant plus d’une illégalité à coup de nouvelles lois ou de nouveaux décrets, vidant de son contenu plus d’un texte juridique à force de le détourner et le contourner, détenteurs de plus d’un compte, fantômes la plupart, directement ou indirectement propriétaires de plus d’un bien immobilier, plus d’un établissement, détenteurs de plus d’une part ou action dans plus d’une société, plus d’une affaire, plus d’une banque, corrompus et corrupteurs à tout va, clientélistes sans répit, de père en fils, de père en gendres… Me faut-il poursuivre ? J’oublie pour sûr plus d’une entourloupe, plus d’une malfaisance, et leur remarquable talent de laisser faire les choses par elles-mêmes. Mais soyons clair, seules les grosses têtes. Les moyennes aussi, ajouta-t-il après coup, celles à un poste conséquent, officiel, disons, sinon c’est une énorme partie de la population qui risque d’y passer, moi y compris. Un petit rire accompagna ces derniers mots. Moi aussi ? Je m’interrogeais forcément. Qui a bien pu échapper à leurs infinies tentacules ? Cela faisait un bout de temps qu’on ne se voyait plus. Nos petites balades étaient souvent silencieuses, échangeant tout juste nos dernières écoutes musicales, nos récentes découvertes, un livre ou un film éventuellement. La mer était quasi immobile à nos pieds, à peine frémissait-elle. Les baigneurs se faisaient rares en cette fin de journée, les marcheurs de plus en plus nombreux. Des familles entières en quête d’un peu…

La suite est à lire sur: lundi.am
Auteur: lundimatin