« Une révolution citoyenne pour se réconcilier avec la nature »

Benjamin Coriat est professeur de sciences économiques à l’université Sorbonne Paris Nord, et cofondateur des Économistes atterrés, un collectif créé en 2010 pour dénoncer l’impasse des choix économiques européens, notamment la « cure d’austérité » imposée à la Grèce. Il est l’auteur, notamment, de : Le Retour des communs — La crise de l’idéologie propriétaire (2015) et de Le bien commun, le climat et le marché — Réponse à Jean Tirole (2021).

Benjamin Coriat, en 2015. Wikimedia Commons/CC BY-SA 4.0/Chris93


Reporterre — Dans Le bien commun, le climat et le marché, vous exposez deux manières opposées d’interpréter et de résoudre la crise écologique.

Benjamin Coriat — Oui, je confronte dans mon livre la vision de Jean Tirole, économiste français néolibéral, avec celle d’Elinor Ostrom, économiste américaine spécialisée dans la question des communs — c’est-à-dire des ressources, naturelles ou non, placées en usage partagé.

Dans Économie du bien commun, paru en 2016, Tirole défend l’idée que le réchauffement climatique serait une « défaillance de marché », qu’il faudrait corriger par… davantage de marché. Pour parer à l’aggravation du climat, il suffirait donc de développer un marché carbone dans lequel l’émission de gaz à effet de serre deviendrait suffisamment coûteuse pour engager les entreprises à réduire leurs émissions.

Est-ce une vision répandue ?

C’est une stratégie qui s’inscrit dans la perspective du Protocole de Kyoto (1997), appliquée en Europe depuis 2005, malgré ses maigres résultats et sa nocivité. Le funeste marché des « droits à polluer » auquel elle a donné lieu est bien connu aujourd’hui, notamment en Afrique.

Ce qui est inquiétant, c’est que la Commission européenne se prépare à s’engager davantage encore dans cette trajectoire. Une des propositions du Green Deal consiste en effet à « étendre le marché carbone » à de nouveaux secteurs économiques. En France, les politiques successivement mises en place — y compris sous François Hollande et Emmanuel Macron — s’inscrivent dans le cadre de ce marché carbone européen.

Le marché du carbone renaît de ses cendres

Autre écueil : le marché carbone circonscrit la crise écologique aux gaz à effet de serre…

Tout à fait. Or le rapport commun du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) et du groupe d’experts international sur la biodiversité (IPBES) publié le 10 juin dernier montre qu’il faut…

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Auteur: Catherine Marin Reporterre