Va-t-on vers une cohabitation ?

Léon Spilliaert. — « Marine avec sillage », 1902.

Dans l’ambiance d’une campagne électorale lancée dès le mois de septembre de l’année précédant le scrutin, on a presque oublié les déconvenues des scrutins antérieurs marqués par une abstention massive. Sans doute le niveau de la participation à l’élection présidentielle sera-t-il honorable tant cette élection, après une mobilisation longue et intense, attire encore les suffrages à un niveau élevé, sans commune mesure avec les autres scrutins. Dans le cas des élections nationales, le calendrier électoral a été réformé en 2002 en même temps que le mandat présidentiel était ramené à cinq ans. Ainsi, désormais, les législatives succèdent immédiatement à la présidentielle. Ce dispositif a été soigneusement pensé. En l’occurrence, le scrutin législatif avait toutes chances d’amplifier le succès du vainqueur, autrement dit de donner au nouveau chef de l’État une majorité confortable. Ce qu’on appelle l’« effet de sillage » n’a rien de bien mystérieux : la mobilisation différentielle joue en faveur du camp vainqueur par une démobilisation des perdants de la présidentielle.

Lire aussi Alain Garrigou, « Éloquente abstention », Le Monde diplomatique, septembre 2021.

L’inconvénient est que cela favorise l’abstention puisque des électeurs considèrent l’affaire jouée dès la présidentielle. Le calcul initial s’est révélé juste, néanmoins, puisque les résultats ont confirmé chaque fois le succès présidentiel, au prix d’un surcroit d’abstention. Il est vrai que la réforme de 2002 avait été adoptée à un moment où le problème ne suscitait pas encore beaucoup d’inquiétude, en tout cas pas celle de la classe politique. Quelques années plus tard, le bond de cette abstention est énorme. Il s’est confirmé à un niveau inédit. On peut même supposer que la réforme a contribué à sa montée.

Élections (%) PrésidentielleLégislativesDiff. participation 2002 71,60 64,42 -7,18 2007 83,76 60,42 -23,34 2012 79,48 57,22 -22,26 2017 77,77 48,70 -29,07

Devant ce phénomène d’abstention élevée et croissante, le président de l’Assemblée nationale a lancé en juin 2021 une mission de réflexion sur les remèdes possibles. Il ne faut pas s’attendre à ce que des solutions techniques changent notablement la donne, dès lors que cette abstention procède d’un rapport d’éloignement à la politique et non de conditions pratiques du vote. En…

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Auteur: Alain Garrigou