Vaccination aux Antilles : après le chlordécone, les habitants ne font plus confiance à l'État

À l’heure où la situation sanitaire a pris un tour dramatique aux Antilles françaises, la méfiance de la population vis-à-vis des politiques nationales de santé est vive. Cela vient en écho au scandale du chlordécone, insecticide responsable de cancers mortels mais aussi de la pollution massive de l’eau et des sols. Aujourd’hui, sa présence est détectée chez plus de 90 % de la population en Guadeloupe et en Martinique.

Aussi, la vaccination et la mise en place du passe sanitaire sont loin de faire l’unanimité : seulement 22,3 % des Guadeloupéens et moins de 20 % des Martiniquais présentent un schéma vaccinal complet. Et il suffit d’un rapide coup d’œil sur la page Facebook de l’Agence régionale de santé en Martinique pour trouver des allusions au chlordécone. « Au lieu de nous forcer à nous vacciner, préoccupez-vous de nos terres, polluées depuis 1972 ! », peut-on lire sous une publication. Abonné à un groupe anti-passe sanitaire sur le réseau social, David explique : « Moi, je dénonce l’hypocrisie de l’État français. Après ce que le gouvernement nous a fait subir, on ne va pas se contenter d’obéir docilement à ses consignes. »

« La parole institutionnelle n’a, pour nous, plus aucune valeur ! »

Entre 1972 et 1993, les bananeraies guadeloupéennes et martiniquaises ont été copieusement aspergées de chlordécone, un puissant insecticide destiné à tuer les charançons qui détruisaient les cultures, dont une partie importante était destinée à la métropole. En 1979, bien que l’OMS ait tiré la sonnette d’alarme concernant les risques de cancer, d’altération de la fertilité et de pollution liés à l’utilisation du produit, ce dernier a continué à être vaporisé sur les bananes antillaises jusqu’en 1993. Un constat d’autant plus douloureux qu’en dépit de son interdiction par la France en 1990, des dérogations ont été signées par le gouvernement pour poursuivre son utilisation pendant trois années supplémentaires aux Antilles. « Il n’y a qu’en Martinique et en Guadeloupe qu’on a utilisé ce produit, et on nous a toujours caché sa dangerosité, explique Guilaine Sabine, fondatrice du collectif Zéro Chlordécone Objectif Zéro Poison, créé en 2012. Vous pensez bien qu’après ça, la parole institutionnelle n’a, pour nous, plus aucune valeur ! »

Guilaine Sabine, fondatrice du collectif Zéro Chlordécone Objectif Zéro Poison, affiche son soutien à d’autres victimes d’épandage de produits chimiques nocifs. © Zéro…

La suite est à lire sur: reporterre.net
Auteur: Reporterre