Vincent Jarousseau : « Pour une auxiliaire de vie, il faut attendre 15 ans pour atteindre le Smic »

Elles sont aides à domicile, assistantes maternelles, auxiliaires de vie sociale ou encore accompagnantes éducative et sociale. Leurs salaires sont faibles et leurs conditions de travail difficiles. Le photographe Vincent Jarousseau est allé à la rencontre de huit femmes qui exercent ces métiers dits « du lien », pour raconter leur travail et leur quotidien.

 basta!  : Pourquoi vous êtes-vous intéressé à ces métiers ?

Vincent Jarousseau : Le choix initial était de mener un projet sur les métiers du lien au sens large, et qui correspond à une accumulation d’observations au cours de mes deux précédents ouvrages, L’Illusion nationale, coécrit avec Valérie Igounet et pour lequel on avait enquêté sur les électeurs du Front national dans trois villes dirigées par le parti et Les Racines de la colère, qui était un travail d’enquête à Denain, dans le Nord, sur la mobilité des classes populaires. Cet ouvrage s’achève sur la naissance du mouvement des Gilets jaunes.

Je travaille depuis plus de dix ans sur la fracture française et les populations invisibilisées. Au cours de ces différents projets, j’ai souvent croisé la route de femmes du lien. Pour paraphraser le sociologue Benoît Coquard, on retrouve « ceux qui restent » dans les territoires enclavés, tandis que les plus diplômés s’en vont.

On retrouve les hommes dans les métiers de la route et du BTP et les femmes dans ces métiers du lien, qui ont des positions centrales sur ces territoires. Avec François Ruffin, on a observé les mêmes choses. Lui, il a fait un travail parlementaire sur les métiers du lien. Et il m’a sollicité avec l’aide à domicile Marie-Basile, que j’ai connue pendant le premier confinement.

Couverture du livre Les femmes du lien

Les femmes du liens

Les Femmes du lien, publié aux Arènes, roman-photo documentaire de Vincent Jarousseau, dessins par Thierry Chavant.

Comment avez-vous choisi les territoires sur lesquels vous avez travaillé pour cet ouvrage ?

Mon choix, c’était de partir de la réalité des femmes qui travaillent dans ces métiers dans la France périphérique. Je me suis intéressé à l’Avesnois, au sud de Maubeuge, un décor postindustriel avec une culture ouvrière très présente, où ce sont les « filles du coin » (du livre de la sociologue Yaëlle Amsellem-Mainguy, Les Filles du coin. Vivre et grandir en milieu rural, ndlr). Ce sont des femmes aux rôles d’aidantes, et qui incarnent aussi un fort investissement local associatif.

Je suis également allé en banlieue périphérique. La…

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Auteur: Maÿlis Dudouet