Voici pourquoi il faut interdire l’alcool à la chasse

Le Sénat vient de publier un rapport d’information proposant « d’interdire l’alcool et les stupéfiants lors de la chasse » et de prendre des mesures similaires à celles appliquées pour la conduite. Cette idée a été fustigée par le président de la Fédération nationale des chasseurs Willly Schraen, lequel n’a pas manqué de rétorquer qu’« un mec bourré sur un vélo, c’est dangereux aussi », oubliant que les règles qui s’appliquent aux automobilistes en matière d’ébriété valent aussi pour les cyclistes.

L’argument véhément du patron de la chasse française ne semble pas résister à la comparaison internationale, quand dans d’autres pays, les organisations de chasseurs recommandent l’abstention d’alcool. Prenons le site officiel d’une agence américaine d’éducation à la chasse : il y est rappelé que « consommer de l’alcool avant ou pendant la chasse augmente les risques d’accident en affectant la coordination, l’audition, la vision, la communication et le jugement ».

Cette préconisation de bon sens n’est pas superflue, puisque l’alcool semble faire encore partie du monde cynégétique, en France comme à l’étranger.




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Aux États-Unis, un loisir souvent pratiqué en état d’ivresse

Ainsi, aux États-Unis, (où la consommation d’alcool moyenne est de 20 % inférieure à la nôtre dans la population générale), une récente enquête menée sur un échantillon représentatif de 2349 jeunes adultes indiquait que 23 % des chasseurs de sexe masculin avaient déjà pratiqué leur loisir en état d’ivresse.

Et en France ? Malgré l’absence de données chiffrées, le rapport sénatorial se hasarde à parler d’une « petite minorité » de personnes qui chasseraient en étant ivres.

Concernant les décès et incidents graves, les sénateurs sont plus précis : 9 % d’entre eux sont imputables à l’ébriété d’un chasseur.

Ce rapport très hexagonal ignore malheureusement la plupart des données internationales disponibles sur le sujet. Il omet de mentionner qu’aux États-Unis, l’ébriété est présente dans 15 % des accidents de chasse. Est également passée sous silence cette vaste étude danoise auprès de 1800 chasseurs qui montre que le risque d’accident impliquant une arme à feu croît directement avec l’alcoolémie

Le récent rapport du Sénat ne prend pas non plus la peine de clarifier en quoi l’alcool s’avère fortement accidentogène. On peut pourtant repérer trois conséquences de l’ébriété qui y contribuent.

Locomotion et coordination motrice

Une étude menée en Suisse dans un service d’urgence hospitalière indiquait qu’un tiers des blessures occasionnées à la chasse résultaient de chutes, par exemple quand un tireur dégringole de son mirador. L’alcool favorise ce type d’incident notamment par son action…

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Auteur: Laurent Bègue-Shankland, Addictologue, Professeur de psychologie sociale, membre de l’Institut universitaire de France (IUF), directeur de la MSH Alpes (CNRS/UGA), Université Grenoble Alpes (UGA)