Yves Teicher (1962-2022)

Ce fichu mois d’avril 2022 signe la mort du jazzman Yves Teicher, violoniste-improvisateur qui laisse un souvenir intense à tous ceux qui l’ont entendu.

Ayant grandi à Liège où la présence de musiciens tels que Boby Jaspar, René Thomas, Jacques Pelzer ou Chet Baker reste inscrite dans les mémoires mélomanes, il découvre dès l’enfance les disques de Charlie Parker, se passionne pour la chanson française – Charles Trenet en premier lieu – et lit les poètes. Rimbaud devient son maître des mots et maître chercheur (« Moi, pressé de trouver le lieu et la formule » ). De formation classique, sitôt quelques premiers prix de conservatoire en poche, il suit des cours avec Ivry Gitlis, puis tourne le dos définitivement à tout académisme. Pendant de longues années, il travaille en solitaire ; en cette même période il découvre l’œuvre de Nietzsche, qui lui ouvre des portes et le confirme dans ses exigences.

Il part faire la manche dans le sud de la France, où il rencontre les musiciens lavallois de Chorda Trio , il joue bientôt avec eux un répertoire de jazz manouche, peu à la mode encore en ces années 80, et très vite suscite l’attention d’un public qui devient nombreux. Ses improvisations virtuoses emportent l’enthousiasme, sa bonne humeur et son humour font le reste. Des tournées en France et en Europe avec ce même groupe connaissent le succès, quelques émissions radiophoniques en témoignent.

Yves Teicher est sollicité en tant que soliste-improvisateur pour la création de la Symphonie n°1 de Schnittke avec le Philharmonique de Rotterdam dirigé par Gennady Rozhdestvenky. Le temps d’un soir, en duo avec Ivry Gitlis, il accompagne la danseuse Carolyn Carlson. Quelques saisons plus tard, il croise la route d’un contrebassiste américain originaire de San Francisco, Bob Drewry, qui a suivi et accompagné jadis les lectures publiques des poètes Bob Kaufman ou Charles Bukowski, s’est installé en Europe où il travaille avec Pierre Boulez et joue notamment avec Mal Waldron ou Sonny Muray. Sur un mode très free, Teicher et Drewry tiennent ensemble la scène avec un brio très remarqué lors d’un festival à Liège, en 1994 . En duo ou avec des complices venus d’outre Atlantique, ils enregistrent des morceaux de Duke Ellington et quelques thèmes personnels.

Teicher & Drewry – Hommage à Duke Ellington

À Paris, Yves accompagne les lectures publiques du poète André Laude, qui un jour le sauva du désespoir. Steve Lacy s’intéresse à ce violoniste inclassable qui aime la…

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Auteur: lundimatin