Zad en Guyane : « Nous ressentons la déforestation dans notre chair »

Une délégation autochtone guyanaise s’est rendue en France métropolitaine pour partager son combat contre une mégacentrale électrique qui menace une centaine d’hectares de forêt amazonienne dans le village de Prospérité, près de Saint-Laurent-du-Maroni. Après avoir lancé une occupation du chantier et fait reculer les machines, la population kali’na exige désormais « le déplacement du projet ». Elle se dit prête « à aller jusqu’au bout » pour défendre d’autres manières d’habiter la Terre, et combattre dans un même élan le colonialisme et la crise écologique.

Reporterre a rencontré deux membres de cette délégation au cours de leur passage à Paris, le chef coutumier Roland Sjabere et le porte-parole de la Jeunesse autochtone de Guyane, Christophe Yanuwana Pierre.

Reporterre — Vous dites avoir créé la première « zone autochtone à défendre » (zad), qu’entendez-vous par cette expression ?

Roland Sjabere et Christophe Yanuwana Pierre — C’est un clin d’œil envoyé aux médias, aux politiques et à nos alliés en France. Nous utilisons vos références pour montrer notre détermination. Vous devez comprendre que nous sommes décidés à défendre nos terres et à mener une résistance forte si ces dernières sont menacées. Les promoteurs du chantier s’attendaient à ce que l’on s’indigne uniquement avec la bouche et la parole. Ils croyaient que nous, peuples autochtones, étions faibles, incapables de nous soulever. Nous leur avons montré le contraire. Nous nous sommes opposés physiquement avec nos bras, nos corps, nos enfants, nos familles et nous avons réussi à faire reculer les machines.

C’est une première victoire même si le combat est inégal. Les autorités ont avec eux la police et l’administration, nous avons de notre côté nos savoirs ancestraux, notre lien à la Terre et notre amour pour le vivant. Ce sont des forces à ne pas sous-estimer. C’est cet héritage qui fait que nous sommes encore debout et que les jeunes générations reprennent le flambeau. 

Quelle relation tissez-vous avec cette forêt ?

Ces terres sont notre espace de vie, de pêche, de chasse et de cueillette. Nous y vivons, nous y connaissons chaque recoin, ruisseau et arbre. Les enfants y jouent et s’y baignent. C’est un lieu d’apprentissage et de spiritualité. La forêt fait partie intégrante de notre identité culturelle. Nous entretenons avec elle une relation intime. La forêt nous rappelle qui nous sommes, nous les Kali’na, en tant que peuple, elle transmet à nos enfants…

La suite est à lire sur: reporterre.net
Auteur: Gaspard d’Allens, NnoMan Cadoret Reporterre