« Alternatives » à la prison – Michel Foucault

Invité à donner une conférence à Montréal dans le cadre de la Semaine du prisonnier, en 1976, Michel Foucault soutient que les sanctions « alternatives » étendent les murs de la prison à toute la société.

Prenant l’exemple des programmes suédois et allemand, il montre comment toutes ces expériences, plutôt que des alternatives, sont des sortes de tentatives pour essayer de faire assumer les fonctions de la prison par d’autres institutions et mécanismes :

  • Sur le travail repose toujours la transformation du prisonnier, comme réplique fondamentale à l’infraction.
  • La refamilialisation reste l’instrument essentiel de la prévention et de la correction de la criminalité, rôle longtemps assumé de façon abstraite par des visiteurs de prison, des aumôniers.
  • En lui donnant une part de décision dans les mécanismes de sa punition, l’individu puni devient « le gestionnaire de sa propre punition », en application du principe de l’amendement : « l’autopunition comme principe de la correction ».

Plus que le délinquant, ce sont ces vieilles fonctions carcérales de resocialisation qu’on libère en les répandant dans le corps social tout entier, « comme une forme de tissu cancéreux ». Lui supprimer un certain nombre de libertés, comme celle de circuler, tout en l’immobilisant par une obligation de travail, de production, de vie de famille, c’est surtout diffuser hors de la prison des fonctions de surveillance qui vont se répandre dans sa vie apparemment libre. « C’est un véritable sur-pouvoir pénal, ou un sur-pouvoir carcéral, qui est en train de se développer, dans la mesure même où l’institution prison, elle, est en train de diminuer. » « Quelqu’un a commis une illégalité, quelqu’un a commis une infraction, eh bien ! on va s’emparer de son corps, on va le prendre en charge plus ou moins totalement, on va le mettre sous surveillance constante, on va travailler ce corps, on va lui prescrire des schémas de comportement, on va le soutenir perpétuellement par des instances de contrôle, de jugement, de rotation, d’appréciation. Tout ceci, eh bien !, c’est le vieux fond des…

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Auteur: lundimatin